Lundi 18 Avril - un détenu se suicide avec son kit anti-suicide
Comment un prisonnier a-t-il pu se suicider au centre pénitentiaire du Havre (Seine-Maritime), alors qu’il disposait d’un kit de protection censé empêcher de se donner la mort ? C’est l’une des questions auxquelles un juge d’instruction du Havre tente de répondre, après la mort jeudi d’un détenu âgé de 21 ans.
Son décès a été révélé par nos confrères de France-Bleu, vendredi. Le jeune homme se trouvait au quartier disciplinaire, lorsque des surveillants l’ont retrouvé pendu dans sa cellule. Le parquet du Havre confirme qu’il est décédé par pendaison. Le motif de son incarcération n’a pas été communiqué.
Le jeune homme « a roulé comme un journal » le pyjama en papier déchirable de son kit de protection, qui est ainsi « devenu plus dur », a expliqué Jean-Philippe Lemaitre, secrétaire local UFAP-UNSA et surveillant à la prison du Havre. Il a ensuite utilisé le pyjama pour se pendre à des barreaux, selon M. Lemaitre, qui a précisé que le jeune homme avait déjà tenté à plusieurs reprises de se suicider.
Il bénéficiait aussi d’un drap déchirable. Une couverture indéchirable, mais en théorie incapable de se transformer en lien, faisait aussi partie du lot, ainsi qu’un matelas antifeu.
Ces kits de protection existent depuis près de deux ans. Ils ont été instaurés en août 2009 par Michèle Alliot-Marie, alors Garde des Sceaux. Le plan d’action pour la prévention des suicides en prison faisait suite à la publication d’un rapport d’une commission présidée par le Dr Louis Albrand.
Ces mesures avaient été jugées insuffisantes dès leur annonce : « Ce qu’elle a repris, c’est le rapport édulcoré, ce n’est pas mon vrai rapport », confiait alors le médecin-psychiatre dans le journal Le Monde. « Ce ne sont pas des mesures à la hauteur de l’enjeu. Il faut une véritable réforme pénitentiaire. Il faut créer de nouvelles prisons, des petites structures, plus humaines. »
Ce suicide intervient dans un contexte tendu dans l’établissement ouvert il y a un an à Saint-Aubin-Routot. Cruel hasard du calendrier, le garçon se serait donné la mort dans la matinée, au moment où une cinquantaine de gardiens manifestaient devant la prison, sur leur temps de repos. Ils dénonçaient notamment les défaillances dans la prise en charge des prisonniers dépressifs : « Celui qui est en souffrance n’est pas forcément écouté par les surveillants. Car nous n’avons pas le temps », déclaraient plusieurs manifestants.
« Il faudrait 184 surveillants en théorie, il y en a 176 en pratique », a regretté Jean-Philippe Lemaitre, en précisant qu’« on est déjà quasiment à la capacité maximale de 690 détenus, on va atteindre des records bientôt ». Un autre détenu s’y était déjà suicidé : en décembre, juste avant Noël, les surveillants avaient retrouvé un homme pendu dans sa cellule.